Un festival se prépare comme on écrit une chorégraphie. Il faut en maîtriser l’intuition de départ afin que le propos soit d’emblée universel. Si les comédiens ou les danseurs échappent à cette exigence, le théâtre n’est que divertissement, et la danse, démonstration de techniques corporelles.
Lorsqu’il travaille avec ses comédiens, le metteur en scène Peter Brook leur demande d’explorer chacun des aspects du spectateur «pour que, au lieu d’accuser ou d’exprimer leur sympathie au public, ils puissent être ce qu’un acteur est censé être : le représentant du public, celui qu’on entraîne et prépare à aller plus loin que le spectateur, (mais) sur un chemin que le spectateur sait être le sien ».
Ce n’est donc pas un hasard si nous avons choisi de commencer ce festival de danse par une répétition publique de la compagnie Paul-les-Oiseaux. A l’esbroufe, nous préférons la modestie du travail, pour qu’il soit clairement signifié que toute expression artistique -reconnue universelle- trouve sa dimension créatrice dans un acte d’engagement. Ainsi est-elle autorisée à nous entraîner ailleurs.
En second lieu, un festival devait être un temps fort, un point d’orgue à la fois complexe et limpide. Complexe, parce qu’on a le devoir d’aborder la réalité humaine sous ses différents aspects et ses tonalités diverses ; chacun doit y trouver son compte. Limpide parce que les créations artistiques longuement mûries portent finalement sur les êtres -nos compagnons d’Histoire- un regard clair dont la simplicité devient source de plaisir.
Enfin, il fallait qu’un festival fût rythmé, au sens quasiment biologique. Alterner les spectacles éclatants à la façon Duroure, Paco Decina ou Patarozzi, avec des moments de contemplation tels que nous les offrent Patrick Bossatti et Bertrand Lombard.
Voici donc la règle du jeu du festival de danses Plurielles dont les chorégraphes invités sont parmi les plus reconnus de ces deux dernières années.
Michel Vincenot
Mars 1994