Lorsqu’il créa cette pièce dans une cour du Festival d’Aix-en-Provence en Juillet 1994, Paco Dècina pressentait que sa danse pût devenir aussi légère et magique que l’air de ces soirées provençales. Ce lieu, il le voulut déshabillé, sans coulisses ni fond de scène, pour être à la fois dedans et dehors, maintenant et dans un temps lointain. «Il n’y aura que la lumière pour peindre les mondes des interprètes, pour leur sculpter un décor, disait-il. Il n’y aura qu’eux avec eux-mêmes, avec leur rêve, dans un vide qui laisse nos corps devant des murs percés.»
Il l’a dit et l’a fait, au risque que ces solos, duos, trios de danseurs nous soient jetés en pleine figure comme d’étranges images de nos corps, surpris par le vide qui laisse place à toutes ces fessures, ces petites blessures de l’invisible.
Paco Dècina est de ces hommes qui ne badinent pas avec les corps, pas plus qu’il n’accepte de les mettre en danger sur des itinéraires convenus. Il les amène à la frontière de l’invisible parce que c’est là qu’ils prennent toute leur clarté.
Saisissante chorégraphie qui éclaire nos propres morcellements et met en lumière nos sentiments les plus nus. Les danseurs laissent derrière eux – devant nous – la sensation d’avoir renoué avec une multitude de corps en dialogue, sans jamais prononcer un mot, un seul mot de verbiage qui briserait le fil qui les relie au mystère : celui d’avoir à se taire pour laisser parler l’océan caché derrière nos murs .
Michel Vincenot
21 Décembre 1995
Distribution
Chorégraphie Paco Dècina
Danseurs
Manuela Agnesini
Alessandro Bernardeschi
Paco Dècina
Chiara Gallerani
Donata d’Urso
Son Olivier Renouf
Lumières Pierre Jacot-Descombes
Costumes Regina Martino
Hello Michel, je n’avais jamais lu ce texte! Poésie qui porte l’imaginaire dans les corps-paysage des danseurs! Merci Michel!
Merci chère Catherine.