Y’a trop de bruit pour que je puisse t’aimer – Carole Vergne

Y’a trop de bruit pour que je puisse t’aimer – Carole Vergne

Mes yeux sont tout brûlés
J’ai essuyé les pétales dorés qui se sont fanés
Mes cils se sont refermés
Une larme était encore accrochée.
Y’a trop de bruit pour entendre les gens crier
Y’a trop de bruit pour entendre la pluie tomber
Y’a trop de bruit pour que je puisse t’aimer.

 

Ces quelques lignes du poème de Carole Vergne ont certainement scellé l’origine du projet de ce solo. Une nécessité à faire le point, une pause pour un silence dans l’instantané bruyant de la vie. Juste le temps de rembobiner le film et de revoir dans des arrêts sur images les moments de l’existence où tout s’est figé ou…  a basculé.

Chercher les lignes de force qui ouvrent des passages est un champ de bataille. La pensée doit s’y confronter au corps, parfois sur des chemins inextricables, parfois dans des évidences que l’on avait trop longtemps ignorées.

Pour retrouver la clarté, il faut donc réinventer des énergies vitales.
Vitales dites-vous ? Oui, celles qui sont construites sur des petites morts successives, qui remettent tout à plat, qui déconstruisent et reconstruisent et qui, finalement, mènent à la perte les certitudes trop longtemps affirmées. Ensemble, nous avons travaillé ainsi au cours de ces résidences de création répétées. Car il faut mille fois reconstruire ce qui semblait définitivement inébranlable.

Il a fallu rechercher le fil ténu de nouvelles énergies, de nouvelles trajectoires, pour être au plus juste du propos d’origine, en sachant toutefois que le propos évoluerait au fur et à mesure que le corps en explorerait tous les états. Ces trajectoires ne s’inventent pas, elles s’expérimentent durant des jours et des jours au risque de buter sur d’autres nœuds obscurs que l’on n’attendait pas, ou de mettre au jour des fulgurances que l’on n’imaginait encore moins. En acceptant que chaque nouveau pas franchi puisse être en contradiction avec les précédentes étapes, on clarifie en même temps la pensée et l’organique, la subtilité de l’imaginaire et la justesse du mouvement.

C’est ainsi que procède la danse en renvoyant dos à dos l’intention de fabriquer de la belle harmonie, mais qui s’avère contradictoire avec les limites que le corps impose du fait de son poids. La danse rend humble. Vu de l’extérieur, Il est difficilement imaginable qu’elle puisse à ce point tenir ensemble la gravité du corps et le ressort mystérieux du mouvement qui la transcende.

C’est exactement là que se situe le champ de la symbolique de la danse, constitutif de l’écriture chorégraphique, qui n’a rien à voir avec les images toutes faites que l’on attend et dont on sait lire immédiatement la signification. C’est dans «l’entre-deux du geste», dirait Daniel Dobbels, que le corps trouve à penser. Et cela n’est pas tangible, ni explicable de façon rationnelle. Car l’harmonie de la danse se construit paradoxalement dans le chaos des bruits environnants. Il faudrait – pour prolonger les propos de Carole Vergne – se boucher les oreilles pour mieux entendre le monde. Il faudrait fermer les yeux pour mieux voir ce qu’on ne voit jamais les yeux ouverts. Il faudrait méditer les yeux fermés avant de parler. Il faudrait écouter les autres par le frémissement de la peau.

Dans les traversées contradictoires des réalités physiques et des images virtuelles (ou idéales), Carole Vergne danse le combat contre elle-même (contre soi-même) et nous fait prendre la mesure de nos propres décrochages, de nos perditions, de nos discordances, de nos déraisons. Dans son bel ouvrage Le danseur des solitudes, Georges Didi-Huberman dit : « Le danseur n’a pas peur de manifester la peur. Voilà en quoi sa dignité, sa grandeur apparaissent comme une bizarrerie dans l’élégance caractéristique des danseurs professionnels. Et pourtant cette bizarrerie n’est que sagesse : la sagesse même de savoir qu’en tout acte gît le risque de tout perdre, c’est-à-dire aussi de se perdre soi-même

La douceur fluide et l’abandon sensuel se trouveront, ainsi, inéluctablement confrontés à la matière hostile et à la fatalité de l’espace qui se referme sur lui-même. Un enclos de combat qui réunit au centre de l’arène l’homme et le taureau, mais un enclos de lumière où la multiplicité des attentes régénère la force inaliénable qui conduit l’humain à ouvrir sans cesse de nouveaux chemins.

 

Michel Vincenot
10 mars 2012

Distribution

 

Chorégraphie et interprétation Carole Vergne

 

Création lumière Florent Blanchon

Création sonore Loïc Lachaise, Johann Loiseau, Carole Vergne

Installations Hugo Dayot, Carole Vergne

 

Création 20 mars 2012
Espaces Pluriels – Pau

 

Photographie Hugo Dayot

A time to mourn – Iris Karayan

A time to mourn – Iris Karayan

Iris Karayan cherche, dans ce duo de femmes, la dualité entre l’homme et l’animal, entre le bien et le mal, entre « mon » territoire et celui des autres. Tout ce que l’on porte en soi de façon archétypale. Le conflit schyzophrénique se répète de façon cyclique. Les danseuses, chevelure au sol, ne montrent jamais leur regard.

La répétition du mouvement finit par introduire des variations qui ouvrent à de nouvelles réalités également cycliques. Et quand les danseuses se retrouvent finalement debout, c’est le corps et le visage, maculés de terre, que l’on verra apparaître. Un duo qui explore la condition de la violence dans les sociétés contemporaines ; la violence qui se transforme en chagrin, le pouvoir en faiblesse et l’humain en animal…

 

Michel Vincenot
20 mars 2012

 

Distribution

 

Chorégraphie Iris Karayan

 

Danseuses

Chara Kotsali

Marilena Petridou

 

Costumes Nikos Papadimitriou

 

Musique Nikos Veliotis

 

Lumières Elisavet Moraki

 

Production ZITA dance company, 2009

 

 

Photographies © Elisavet Moraki

Eloge de la métamorphose – Catherine Dreyfus

Eloge de la métamorphose – Catherine Dreyfus

Quand l’humanité émerge des enfermements qu’elle a elle-même générés, elle est loin d’imaginer qu’une société d’esclavage s’est installée de façon pernicieuse à l’insu des individus qui la composent. Celle de la consommation n’en est qu’un des symptômes et met en évidence le déterminisme aveugle qui paralyse une civilisation, au point qu’elle n’est plus en mesure d’envisager son propre avenir.
Ce fut le cas des grandes civilisations ou des empires disparus, faute d’avoir su à temps imaginer leur renouvellement. Car, « là où croît le péril, croît aussi ce qui la sauve. La métamorphose serait effectivement une nouvelle origine, écrit Edgar Morin. Et l’origine est devant nous, disait Heidegger. »  La perte de vigilance entraîne inéluctablement la disparition d’une civilisation.

Cette considération de départ est à l’origine du projet de Catherine Dreyfus. Faire l’éloge de la métamorphose, en évitant de rabâcher éternellement les mêmes discours pseudo-politiques ou moralisateurs sur la société anéantie par sa propre évolution.

Et paradoxalement, ce sont les objets incriminés qui, détournés de leur fonction, deviennent les motifs du merveilleux. Les hommes sont absents et les caddies dansent.
Ils se retourneront contre eux dans une course effrénée consécutive à l’ivresse d’un système de consommation sacralisée, sur la musique de Gregorio Allegri. Consommateurs fascinés et dépourvus de solutions, ils tenteront tant bien que mal de s’y opposer. Reprendre le dessus, engager l’énergie presque surhumaine du contre-pouvoir, chorégraphiée avec audace par Catherine Dreyfus.

Les hommes seraient donc soumis aux systèmes qu’ils ont eux-mêmes créés, sans doute malgré eux.
Et c’est la figure emblématique de l’esclave qui s’impose comme un leitmotiv ; tête baissée, pieds entrecroisés pour ne pas dire enchaînés, à travers la dialectique de la fascination et de la révolte. Ainsi, le bloc monolithique des chariots est disloqué. Transposés en spectateurs de l’arène antique et substitués aux humains, les caddies pourraient être les témoins muets des jeux romains où l’on prenait plaisir à jouir de la mort. Violence de la bestialité et tous les mécanismes qui vont avec : vigilance, suspicion, confrontations, évitements et échappées, interprétés dans la précision du geste et la rapidité du mouvement. La loi de la jungle, au fond, et le talent des danseurs en cadeau.

Vient alors le temps de la métamorphose. Les caddies sont renversés, dispersés jusqu’au chaos, prémonitoire de l’épuisement. Dans le long moment de silence qui suit, il faut réapprendre à parler. Il faut réapprendre à marcher sur des appuis liquides ; le sol se dérobant sous les pieds. La pièce se recentre sur ce beau solo de Vincent Simon qui redonne à l’espace une respiration fluide.
D’autres viendront par la suite reconstruire un monde improbable sur les ruines. Peut-être même le monde imaginaire d’une construction aléatoire qui défie les lois de l’équilibre et de la gravité. Un totem instable place l’homme, ébahi et déconcerté, à son sommet.

Chacun devra retrouver son identité dans le fatras des habits-chiffons que l’on s’arrache.
Cette deuxième métamorphose libère une autre énergie : le temps de la vie insouciante, le temps des jeux de l’amour à la façon des adolescents, sous le regard étonné d’un personnage lunaire hors du temps.

Celui-ci finira par rejoindre le groupe qui refait, à l’envers, le chemin de l’humanité. Lorsque les précurseurs de l’homme n’avaient ni bras ni jambes, ils ondulaient comme des otaries rejoignant sur le ventre la rive de la terre ferme.

Cette composition chorégraphique inventive parvient, par translation, à substituer les corps humains aux casiers de métal. Par glissement de sens, les hommes ont remplacé les objets. Les trajets des caddies ont laissé place aux chemins des hommes, jusqu’à la posture méditative portée par la musique de Palestrina. L’esclavage issu du matérialisme laisse place à la métamorphose venue de l’esprit. La boucle est bouclée, ou plutôt, le cycle infernal s’est brisé.

 

Michel Vincenot
15 janvier 2012

Distribution

 

Chorégraphie Catherine Dreyfus

en collaboration avec les interprètes

 

Sur une idée de Christian Sonderegger

 

Danseurs :

Mélodie Joinville,

Simon Bailly,

Vincent Simon,

Claudio Ioanna,

Gaétan Jamard

 

Lumières Arnaud Poumarat

Musique Jacopo Baboni Shilingi

Scénographie Eric Desvignes, Etienne Andréys

Costumes Mina Ly

 

Création 10 et 11 janvier 2012, Espaces Pluriels, Pau

One – Kirsten Debrock

One – Kirsten Debrock

L’individu est unique, c’est pourquoi il est fondamentalement un être de relation. C’est le paradoxe de l’humain. Son unicité solitaire le prédispose à chercher des prolongements dans l’altérité. Mais avant d’entrer en relation, il doit se soumettre à ses propres limites : le poids massif qui le colle à la terre.

Corps en gestation, ramassée sur elle-même, mains à plat sur le sol, la danseuse prend la mesure de son propre espace (le volume de son corps). Les mains se déroulent et se posent sur les omoplates, explorant l’espace de derrière, celui qu’on ne voit pas mais que l’on sent, que l’on pressent, devrait-on dire.

Le dos rond se creuse alors insensiblement pour laisser pénétrer la hauteur, entre gravité et élévation. C’est la première dimension de la posture de l’humain qui se déplie (se déploie) lentement et se redresse sur demi-pointes.

Risquer ainsi l’équilibre instable en composant dès le départ avec le poids et la hauteur, c’est combiner deux forces contradictoires que la danse sait interpréter dans le même mouvement. Et c’est le deuxième paradoxe.  En effet, après avoir été soumis au poids, l’attraction qui vient d’en-haut échappe à toute connaissance tant que l’homme n’a pas pris conscience de sa verticalité. Celle qui constituera l’essence même de son être au monde.

Et c’est à cet instant – à cet instant seulement – qu’un cri muet, prémices du langage, peut tenter de s’extraire du corps – bouche grande ouverte – pour prolonger la conscience de sa présence à ce monde qui lui est d’abord étranger. Ce cri muet qui précède le langage est le premier geste qui tentera d’articuler des sons et constituera plus tard les mots et le vocabulaire pour communiquer.

L’homme doit donc composer avec l’inertie du départ, constitutif de l’espace corporel de l’humain.
Le basculement du torse et de la tête en arrière explorent cette fois-ci les trois dimensions de l’espace, y compris celles que l’on ne voit pas, franchissant ainsi l’étape de la ligne verticale (sa posture naturelle) à la ligne courbe qui donnera à la danseuse la liberté de s’ouvrir à ce que l’on ne perçoit pas encore naturellement.

Par la succession de pliés qui ramènent ses genoux au sol, et de relevés qui la portent à la verticalité, la danseuse instaure ainsi la réminiscence de son état d’origine (le sol) et de son état grandi par l’ouverture vers le haut (la verticalité). Deux lignes verticales, main gauche, doigts tendus vers le bas, et main droite, doigts dressés vers le haut, sont des directions contraires qui marquent le statut de l’homme dans ses origines et dans sa destinée.

Redessiner un corps partagé en deux, entre la singularité inaliénable de l’individu et la nécessité de la partager avec les autres : « L’individu est une partie d’un tout qui réunit les autres », dit Kirsten Debrock. L’homme se révèle découvreur de son propre environnement. Expulser le souffle comme on sort de soi-même, coude levé et doigts vers le sol, ou modeler la respiration entre deux mains, comme s’il fallait désormais partager l’air, cet élément qui nous relie aux autres.

Le défi de l’humain est donc dans la synthèse de mouvements contraires : partir du bas, puis bras tendu vers le haut, terminer le mouvement dans un poignet crocheté. Celui-ci ouvre à une autre direction dans l’espace qui nous rappelle que l’homme se pose sans cesse la question de son devenir relationnel. Les autres feront désormais partie de son propre espace.

C’est ainsi qu’on entre dans la dialectique. Est-ce l’affectif ou le rationnel qui doit prendre le dessus quand on est sollicité par l’autre ? Les petits gestes  impulsifs des doigts, l’éjection des mains qui projette le corps hors de lui-même, qui évacue les petites manies protectrices. Ou alors l’expression d’une inquiétude par laquelle l’individu solitaire tente de se protéger ?

Les changements rapides de direction des bras entraînent le déhanchement, qui génère à son tour un déplacement d’énergie : le basculement de la tête en avant. Étrangement, la danse revisite L’homme derrière la vitre, cette lithographie d’Ernest Pignon-Ernest qui suggère que le lâché de tête pourrait être un abandon par découragement. Ou alors le contraire, l’homme se rendrait humblement réceptif à toute sollicitation venue de l’extérieur.

Alors s’installe la synthèse des dimensions contraires. L’alternance de verticalités, de courbes et d’expulsions du geste sont l’expression des contradictions de l’humain, confronté à un univers qu’il devra désormais faire sien. Les pivots rapides sur les pieds, l’éjection des bras et des cris projettent la tête de l’autre côté. La déclinaison de ces postures dans toutes les positions, y compris genoux au sol, devient une composition riche en événements qui font la subtilité de l’écriture chorégraphique. Mains et avant-bras croisés soulèvent le menton qui élève à son tour le corps entier. Cette syntaxe gestuelle de la danse reconstruit un corps tissé de gestes d’où surgit le mouvement inattendu.

Danse énergique dans la belle élégance de l’interprète Deborah Lary qui maîtrise le mouvement jusqu’au bout. Les tours rapides, les gestes saccadés et les arrêts précis transfèrent l’énergie en un autre endroit du corps, dans des qualités paradoxales : de la géométrie des lignes à l’ondulation sensuelle. Les mains flottent au-dessus de la tête, puis reviennent à la ligne descendante, jusqu’en bas cette fois-ci, main posée au sol. À son contact, c’est tout le corps qui resurgit vers le haut dans un magnifique développement du mouvement. Jouer avec les paradoxes du mouvement pour en laisser surgir la pensée qui ne sera jamais pensée unique. Décidément, l’art de la danse transcende les corps pesants de l’humanité.

Chutes, allongée sur le dos, la danseuse remonte et change de direction. Les tensions permanentes entre le haut, le bas et le côté sont toujours anticipés pour devancer l’instant où le mouvement devra trouver son aboutissement. Aboutissement dans l’horizontalité en l’occurrence. Etape intermédiaire qui réunit au sol l’aquatique et l’aérien (comble du paradoxe lorsque le corps se trouve dépendant de la gravité) ; le poids suspendu à la légèreté, réunis par le croisement des jambes dans le creux poplité.

Viennent alors les glissades au sol et les renversements vers l’arrière. Les retournés du torse oscillent entre l’attraction vers l’avant et la retenue vers l’arrière. Genoux ancrés dans le sol, doigts et visage dans l’aérien, l’homme est paradoxal comme l’est la danse lorsqu’elle entreprend d’atteindre le sens de la relation avec les autres en régénérant le lien par l’intelligence du mouvement.

Flotter en l’air quand on est au sol, c’est défier l’espace les yeux fermés en s’infiltrant comme une onde aquatique à l’intérieur du corps des autres. L’improbable contact, aussi délicat que le contact avec le sol, pourrait être encerclement (mort). Il est au contraire un toucher de tendresse qui libère l’encerclé de son propre poids. La danse est un art quand elle détourne le mouvement du sens attendu et nous conduit à porter notre regard au-delà des choses convenues.

Michel Vincenot
25 décembre 2011

Distribution

 

Chorégraphie Kirsten Debrock

 

Interprétation Deborah Lary

 

Design sonore Olivier Soliveret

Lumières Lætitia Orsini

Costume Rachel Sleet

 

Création 16 décembre 2011
Saint Gervais-sur-Mare

 

 

Photographie David Dubernard

Ici – Olivier Normand / Mylène Benoît

Cet étrange rapport au temps qui consiste à revenir sur le passé récent d’un événement vécu par un autre interprète, 30 secondes auparavant, est une prouesse mentale qui nécessite une capacité de présence soutenue à l’instant qui arrive, «ici» et pas à un autre moment.

Présence intéressante à deux points de vue :

Le premier concerne le travail de composition de la danse elle-même qui, par nature, est toujours confrontée à la question de la naissance du geste, et de son devenir avant qu’il ne meure.
Ainsi, le petit chant exécuté en canon par les danseurs, hésitant et plus ou moins harmonieux au départ, se décompose progressivement pour devenir finalement un balbutiement.

La danse est un acte éphémère, nous le savons. C’est pourquoi les mouvements doivent être combinés de telle façon qu’on accepte, d’une part, qu’ils trouvent leur propre fin, et d’autre part qu’ils rebondissent sur les mouvements des autres interprètes pour renaître dans un autre espace-temps. Cette articulation constitue le fondement-même de l’écriture chorégraphique, toujours tendue sur un fil, au point que la pièce se termine par le dénuement des corps et la dissolution du geste dans le flou de l’image.

Le deuxième point de vue est cette fois-ci plus philosophique. Dans ce rapport au temps, le présent est quasiment absent. Il est troublé, absorbé dans l’instant par le passé, tandis que celui-ci est immédiatement projeté dans l’avenir. Ce va et vient entre le passé et l’avenir ignore le présent auquel nous sommes tant attachés, au nom de l’immédiateté de l’action qui fait l’efficacité de la productivité.

A contrario, Olivier Normand et Mylène Benoît mettent en évidence ce présent sans racine et sans avenir dans cette pièce exigeante «Ici».

 

Michel Vincenot
2 février 2011

Distribution

 

Conception, direction artistique, chorégraphie

Mylène Benoit et Olivier Normand

 

Danseurs

Nina Santes

Beatriz Setien

Matthieu Bajolet

Denis Robert

 

Création sonore Daniele Ghisi

Création lumière Renaud Lagier et Aurore Leduc

Régie lumière Aurore Leduc

Développement informatique Julien Delmotte

Régie générale et informatique Maël Teillant

Ingénierie vidéo Christian Thellier, Maël Teillant

Costumes Carole Martinière